Revue Française de la recherche
en viandes et produits carnés

ISSN  2555-8560

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Résumés - Process et Technologies

L’importance du gras intramusculaire (persillé) dans la viande bovine vis-à-vis de la qualité organoleptique a récemment été de nouveau démontrée. INTERBEV (l’interprofession française du bétail et des viandes) en a ainsi fait un axe d’amélioration de la qualité de la viande bovine dans le cadre de son plan de filière. Le présent travail vise à améliorer la qualité sensorielle de la viande proposée aux consommateurs. Un plan d’action a été mis en œuvre et l’Institut de l’Elevage (IDELE) a développé une grille de mesure pour INTERBEV, afin de permettre aux abatteurs de mesurer ce critère. Actuellement, les niveaux de persillé des bovins de races françaises sont mal connus et aucun état des lieux n’a été réalisé à ce jour avec ce référentiel. Ce travail fait un état des lieux des niveaux de persillé des bovins de races française et objective les liens entre certaines caractéristiques des carcasses (âge, poids, conformation, état d’engraissement) et le persillé. Cette étude s’inscrit dans les priorités du plan de filière viande bovine visant à mieux répondre aux attentes du consommateur en matière de qualité organoleptique.

Cet article est une synthèse d’une session consacrée à la recherche sur le persillé ou le gras intramusculaire chez le bœuf et l'agneau présentée lors du congrès annuel de la fédération européenne des sciences animales (EAAP) à Florence du 1er au 4 septembre 2024. Une vue d'ensemble du développement du persillé a été présentée insistant sur les rôles de la génétique en termes de prolifération et de localisation des adipocytes intramusculaires et de croissance musculaire, ainsi que sur le rôle de la nutrition et de l'âge de l'animal durant la finition. L'avènement de nouveaux outils de mesure en ligne du taux de gras intramusculaire a conduit au développement d'un nouveau modèle australien des normes de la viande pour prédire la qualité sensorielle de la viande d'agneau sur la base de l'équilibre entre le rendement en viande maigre et le taux de gras intramusculaire. D'autres technologies basées sur la chimie des lipides du tissu musculaire, telles que la spectrométrie de masse à ionisation par évaporation rapide (REIMS), sont très prometteuses pour classer les pièces de viande cuites selon leur flaveur et leur qualité globale attribuée par les consommateurs. Enfin, la détermination chimique du taux de gras intramusculaire est proposée comme la meilleure méthode pour étayer les futurs systèmes de classement des carcasses qui est actuellement basé sur l'évaluation visuelle du persillé.

Le persillé est défini comme l’infiltration de gras entre les fibres musculaires. De nombreuses études confirment son impact positif sur la qualité organoleptique de la viande bovine. INTERBEV (Interprofession du bétail et des viandes) a choisi de travailler sur ce critère afin de répondre aux attentes des consommateurs en matière de qualité organoleptique. Un vaste plan d’action a été construit autour de cette thématique et l’évaluation du persillé en est la clé de voûte. Il est en effet crucial d’évaluer ce critère pour mieux le piloter en élevage.
En collaboration avec différentes entreprises d’abattage-découpe, IDELE (Institut de l’Elevage) a construit une grille d’évaluation du persillé adaptée au contexte français. Ce référentiel de mesure a été testé en conditions réelles afin de s’assurer de sa fiabilité et de le valider. L’interprofession impose aux abattoirs qui le désirent d’utiliser cette grille pour évaluer le persillé en complément des mesures déjà effectuées en routine, tels que la conformation, le poids de carcasse et l’état d’engraissement. Un accord interprofessionnel encadre le déploiement de ce référentiel et définit les modalités de son utilisation. Par ailleurs, IDELE étudie la possibilité d’instrumentaliser la mesure en vif et en carcasse afin d’améliorer la fiabilité des données collectées et d’optimiser leur remontée.

En Australie, l'évaluation de la qualité de la viande bovine est réalisée au niveau de la noix de côte des carcasses selon les normes du « Meat Standards Australia » (MSA) et permet de décrire les caractéristiques de la viande commercialisée. L'une des caractéristiques évaluées visuellement est l’importance du persillé. En Europe, les abattoirs s'intéressent de plus en plus à l'évaluation de ce critère. Ces dernières années, il est devenu de plus en plus important de disposer de technologies de mesure objectives garantissant un classement cohérent, précis et normalisé pouvant être adopté par la filière viande bovine. La caméra Q-FOMTM Beef prédit le taux de persillé et le pourcentage de gras intramusculaire déterminé chimiquement (IMF%). Cet article résume l'exactitude et la précision de la prédiction du score MSA de persillé et du pourcentage de gras intramusculaire par la caméra Q-FOMTM Beef pour des carcasses bovines australiennes, découpées en quartiers aux 10ème-13ème côtes, et pour des carcasses bovines européennes, découpées en quartiers aux 4ème-6ème côtes. La caméra Q-FOMTM Beef prédit le score de persillé MSA avec une précision d'environ 50 points de persillé MSA et le taux d’IMF% avec une précision de 1,3% aux deux sites de découpe des carcasses. Ces résultats sont importants pour les filières bovines européennes et australiennes. La caméra Q-FOMTM Beef est disponible dans le commerce et convient au classement des carcasses dans les chambres froides et en milieu industriel.

Dans les abattoirs européens, pratiquer la coupe avant/arrière des carcasses bovines entre la 10ème et la 13ème côte, comme en Australie, plutôt qu’à la classique 5ème côte peut engendrer une dépréciation financière, ce qui freine les abattoirs à réaliser ce type de coupe. Cette étude avait donc pour objectif de comparer les scores de classement de persillé, couleur de viande et couleur de gras du M. longissimus thoracis et lumborum lors de coupes à la 5ème et à la 10ème vertèbre thoracique. Les conséquences sur la prédiction de la qualité de la viande par le modèle Meat Standards Australia (MSA) ont ensuite été évaluées pour des vaches de réforme, lesquelles produisent la majorité de la viande bovine consommée en France. Les carcasses de 208 vaches françaises, principalement de race Limousine, ont été classées selon le système australien ABCAS (« Australian Beef Chiller Assessment System ») employé pour la mise en œuvre du système MSA et de son équivalent européen, le système 3G. Il n’y a pas de différence significative de persillé entre les deux sites de mesure, ni de scores de qualité sensorielle globale (MQ4) des muscles ou de l’index MSA de la carcasse calculés à partir de ces mesures. En revanche, la couleur de la viande est significativement plus sombre à la 10ème qu’à la 5ème côte et la couleur du gras plus jaune. En France, le classement de persillé du M. longissimus thoracis et lumborum doit s’effectuer à la 5ème côte selon le référentiel interprofessionnel en vigueur. Les résultats de cette étude suggèrent qu’il pourrait techniquement aussi se faire à cet endroit avec le référentiel MSA/3G, pour des recherches sur bovins allaitants en Europe. Cependant, des investigations et ajustements supplémentaires seraient nécessaires pour utiliser d’autres critères essentiels du classement MSA/3G (comme l’épaisseur du gras dorsal) afin qu’ils soient compatibles avec les pratiques habituelles de séparation en quartiers des carcasses européennes.

L’impact de la position du pistolet à tige perforante sur les dommages cérébraux a été étudié sur 19 bovins. L’objectif était de définir une méthode fiable pour léser le Système Réticulé Activateur Ascendant (SRAA) qui est fortement impliqué dans la conscience. Les positions testées ont été deux positions situées à l’intersection des diagonales entre l’œil de l’animal et la base de la corne opposée (positions Basse, Œil-corneB et Haute ; Œil-corneH) et deux positions situées au milieu d’une ligne entre le sommet de la tête et la ligne reliant les deux yeux de l’animal (positions Basse, MédianeB, et Haute, MédianeH). En utilisant la position Œil-corneB, la tige est passée le plus souvent sous le cerveau. Les positions Œil-corneB et Œil-corneH ont été influencées par la forme de la tête. Les positions MédianeB et Œil-corneH ont permis de léser le SRAA d’environ la moitié et les trois-quarts des animaux, respectivement. La position MédianeH a permis quant à elle de léser le SRAA de manière satisfaisante (dans la zone cible : 95% des animaux ; à la limite de la zone cible : 5% des animaux). Les inconvénients de cette position sont le risque d’un tir trop caudal et le fait que les canthi externes des yeux sont plus difficilement repérables. En conclusion, placer le pistolet 1 cm plus bas que la position MédianeH, ou environ 2 à 3 cm plus haut que les positions Œil-corneH ou MédianeB, maximise la probabilité de léser le SRAA, en limitant les risques d’un tir trop caudal.

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Edito

A point nommé

La publication dans cette lettre d’information de « l’appel à action de Denver » et d’un article expliquant la genèse de cette mobilisation de chercheurs du monde entier (1) en faveur d’un débat public rationnel et étayé scientifiquement sur l’élevage et la viande tombe à point nommé. Une émission télévisée toute récente (2) illustre à quel point le traitement de ces questions semble vouloir régulièrement sortir de ce cadre pour y être porté sur un terrain émotionnel et moral, mais surtout idéologique. A son corps défendant, l’élevage et la viande se retrouvent ainsi attirés, comme dans un guet-apens, dans un affrontement fantasmé entre animal et végétal. L’essentiel du documentaire a ainsi été consacré à discréditer une partie des acteurs du débat, affublés des arrière-pensées les plus sombres. Au bout d’une heure trente, qu’est-ce que le téléspectateur aura retenu ? Pratiquement rien, en dehors de ces supposés noirs desseins des filières, puisque l’émission réussit la performance de n’aborder aucun des sujets sur le fond. Le citoyen n’aura ainsi rien appris sur la consommation de viande en particulier de viande rouge (inférieure en moyenne en France aux recommandations nutritionnelles). Il ne saura rien des méthodes d’élevage en cours en France en comparaison de celles du reste du monde (il y aurait pourtant tant à dire). Il ne connaitra pas plus non plus les contributions et efforts du secteur élevage-viande en matière d’atténuation climatique. Alors oui, les signataires de l’appel de Denver ont raison de se mobiliser pour une politique guidée par le souci d'une alimentation équilibrée et de vouloir en finir « avec le discrédit généralisé de la viande, des produits laitiers et des œufs pour en revenir à des recommandations alimentaires pleinement fondées sur des preuves scientifiques, économiquement et culturellement appropriées ». Ces chercheurs ont aussi raison d’attirer l’attention sur la prise en compte de la reconnaissance de la complexité des systèmes d'élevage et de l'écologie ou de rappeler que le rôle des scientifiques est de se confronter les uns aux autres « en appliquant des méthodes scientifiques rigoureuses, dans le respect mutuel et avec ouverture d’esprit ». Non, la viande n’est ni de gauche ni de droite, ni masculine ni féminine, ni malfaisante ni miraculeuse. Elle participe à l’équilibre alimentaire de milliards d’hommes et mérite mieux que d’être ainsi l’otage de combats politiques complaisamment mis en scène.

Bruno CARLHIAN et Jean-François HOCQUETTE

(1) https://www.dublin-declaration.org/fr/
(2) https://www.france.tv/france-2/complement-d-enquete/7205066-la-guerre-de-l-info-touche-pas-a-mon-steak.html