
Dans la plupart des pays d’Europe, la demande des consommateurs pour des plats prêts-à-consommer est en augmentation. Ils peuvent être commercialisés sous différentes formes, réfrigérés, congelés, déshydratés ou en conserve, mais on observe une tendance à la croissance du marché des plats réfrigérés. Pour l’industrie agroalimentaire, l’amélioration qualitative des plats prêts-à-consommer constitue un nouveau défi.
Cet article est issu d‘une conférence réalisée dans le cadre de la première biennale de l’innovation dans les filières viande MEAT’In qui s’est tenue à Clermont-Ferrand les 19 et 20 novembre 2009. Il a fait l’objet d’une publication dans la revue Fleichwerchaft.
LE MARCHÉ EUROPÉEN DES PLATS PRÊTS-À-CONSOMMER
La plupart des repas plats-à-consommer réfrigérés disponibles sur le marché sont préalablement cuits par les industriels puis réchauffés par les consommateurs dans des fours à micro-ondes ou par d’autres moyens. Les techniques mises en oeuvre au plan industriel pour cuire les produits sont la cuisson sous vide de produits préemballés ou bien le remplissage à chaud de l’emballage. Les emballages peuvent contenir un ou plusieurs compartiments pour les différents composants du plat. La durée de vie microbiologique des plats précuits peut être de 3 à 4 semaines ou plus. En fin de vie, les plats peuvent devenir moins appétants en raison de l’apparition de défauts de couleur, de texture ou d’apparence générale. Souvent, les emballages des plats prêts-à-consommer sont couverts par un carton ou un film opaque où sont imprimées des photos des produits finis.
Un petit segment du marché européen des plats prêts-à-consommer concerne les plats prêts-à-cuire. Ces plats consistent en de la viande ou du poisson cru, des légumes préparés crus, des aliments de base pré-cuits ou semi-cuits tels que du riz, des pâtes ou des pommes de terre, et une sauce préparée. Comme ces plats ne sont cuits qu’une seule fois par le consommateur, de préférence au four à micro-ondes, ils semblent avoir meilleur goût que les plats précuits. Les plats prêts-à-cuire sont commercialisés dans des pays tels que les Pays-Bas, le Royaume-Uni, mais le volume des ventes est limité par une durée de vie microbiologique courte, de l’ordre de 5 à 6 jours. La conséquence de cette dégradation rapide des produits est que 20 % des plats sont éliminés ou vendus à un prix inférieur. L’augmentation du volume des déchets alimentaires n’est pas souhaitable d’un point de vue éthique et environnemental. Pour les transformateurs et les distributeurs, il est difficile de réaliser des profits avec de telles contraintes.
Le programme de recherche financé par l’Union européenne intitulé Double Fresh se focalise sur la problématique de l’amélioration de la qualité et de l’image des plats prêts-à-consommer. L’objectif de ce projet est de produire des plats qui soient savoureux, sains et nutritifs, et compatibles avec les modèles économiques développés pour les repas à longue DLC. Le projet associe plus de 20 partenaires scientifiques et industriels sur la période 2006-2009. Le programme de travail a été partagé entre les plats précuits et les plats prêts-à-cuire. Deux exemples de nouveaux plats prêts-à-cuire norvégiens contenant de la viande et du saumon sont présentés dans cet article. Le développement technologique de ce type de produits repose sur des facteurs clefs incluant la sélection de matières premières crues de haute qualité, le pré-traitement de certains ingrédients périssables et le recours à un conditionnement sous atmosphère modifiée. La perception par le consommateur de la qualité de ces deux plats et des différents modes de conditionnement sont détaillés.
MATÉRIEL ET MÉTHODES
Le plat à base de poulet contient du blanc de poulet cru, du brocoli, du chou-fleur, des carottes, du riz précuit et une sauce aux baies de poivre. L’autre plat contient un morceau de filet de saumon, des petits pois, du chou-fleur, des carottes, des pâtes pré-cuites et une sauce à la crème aux champignons. Les deux plats pèsent 475 g. Les plats sont illustrés par une photo en figure 1.
La viande et le poisson ont été utilisés 1 à 2 jours après abattage avec une charge bactérienne d’environ 3,5 et 2 log respectivement. La viande de poulet a été marinée dans un jus non sucré d’airelles (Vaccinium vitisidaea) pendant 10 minutes dans l’objectif de diminuer la croissance des bactéries inévitablement présentes en surface de la viande. Le jus a pénétré sur une profondeur de 1 à 2 mm dans la viande, l’augmentation du poids était inférieure à 1 %. Les airelles, cueillies en Scandinavie, au nord de l’Eurasie et en Amérique du Nord, ont un goût légèrement amer et contiennent divers acides tels que l’acide benzoïque, des flavonoïdes et d’autres composés anti-microbiens. Le pH du jus d’airelle utilisé était inférieur à 3. La concentration du jus et la durée de la marinade ont dû être ajustées afin d’obtenir l’effet recherché sur le goût, la couleur et l’exsudat. Le marinage du saumon dans un jus d’airelle a été abandonné en raison de la coloration rouge induite sur la viande de saumon.
Les légumes ont été lavés à l’eau deux fois et essorés pour enlever l’excès d’eau. Aucun autre traitement ou additif n’a été utilisé sur les légumes.
Le conditionnement sous atmosphère modifiée des légumes d’une part, et de la viande et du poisson, d’autre part, doit prendre en compte des contraintes différentes, notamment en termes de respiration. Pendant le projet, plusieurs mélanges gazeux associant oxygène, gaz carbonique et azote ont été testés. La composition du mélange gazeux doit être précisément ajustée. En général, les légumes ont besoin d’au moins 2 à 3 % d’oxygène et moins de 15 à 20 % de gaz carbonique au cours du stockage pour optimiser leur durée de vie et leur qualité. Un niveau d’oxygène inférieur à 2 % cause une dégradation rapide des légumes. Le taux de respiration et le besoin en oxygène different de manière importante d’un légume à l’autre. La maturité des légumes et le procédé utilisé pourraient également jouer un rôle sur les intensités de respiration. Dans cette étude, plusieurs mélanges de légumes crus ont été testés dans des emballages microperforés afin de déterminer les légumes les plus robustes et les plus adaptés à la confection de plats prês-à-cuire.
Au contraire, la durée de vie et la qualité de la viande et du poisson sont optimisées par un conditionnement anaérobie et des concentrations importantes de CO2. Dans notre concept de plats prêts-à-cuire avec un emballage micro-ondable avec un compartiment pour tous les ingrédients, le choix du matériel d’emballage et de la composition du gaz relève du défi. À un stade précoce du projet, nous avons décidé de créer des atmosphères modifiées optimisées pour le conditionnement de la fraction végétale du plat. Cette stratégie place la viande et le poisson comme des maillons faibles dans l’obtention d’une amélioration de la durée de vie des plats. C’est pourquoi nous avons imposé un niveau d’exigence élevé pour la qualité des matières premières et mis en place une étape de marinage pour le poulet.
Les ingrédients étaient placés sur des barquettes transparentes en commençant par le fond avec la sauce, suivie par le riz ou les pâtes, les légumes et la viande ou le poisson au dessus. Les emballages ont été remplis avec un mélange gazeux constitué de 5 % O2 / 10 % CO2 / 85 % N2 en utilisant une scelleuse Promens 511VG (Promens, Kristiansand, Norvège) comme l’illustre la figure 2. Les barquettes ovales étaient du type polypropylène 1221-1G (Faerch Plast, holstebro, Danemark) et de contenance 1150 cm3. Le film utilisé était un film micro-perforé de type 52LD (Amcor Flexibles, Bmxelles, Belgique). La dimension des perforations a été adaptée en fonction du mélange de légumes constituant les plats.
En contrôlant le niveau d’O2 présent dans l’emballage pendant le stockage, il est possible de prévoir les changements de qualité et de statut microbiologique des plats. Les niveaux d’O2 pour le saumon, le poulet mariné et le poulet non mariné sont présentés dans la figure 3. Jusqu’à 9 jours de stockage, les concentrations en oxygène étaient de 5 à 7 %, un petit peu au-dessus de la cible de 3 à 5 %. La chute du niveau d’O2 après 9 jours de stockage témoigne d’une consommation d’oxygène par les bactéries, qui est plus rapide dans le cas de la viande non marinée. L’air peut être utilisé comme une alternative au remplissage par du gaz. Les 2 à 3 jours nécessaires pour atteindre l’équilibre gazeux souhaité réduiront dans ce cas la durée de vie du repas par rapport à la situation où un mélange gazeux optimal est utilisé dès le départ.
Le film supérieur des barquettes peut être équipé de valves vapeur (e.g. Amcor ProtectValve) qui s’ouvrent automatiquement quand le contenu de l’emballage placé au four à micro-ondes se réchauffe. Les valves vapeur permettent un chauffage plus rapide et plus uniforme dans le cas de l’utilisation d’un four à micro-ondes. La dimension et l’épaisseur des différents ingrédients doivent également être adaptées pour rendre le chauffage aussi homogène que possible. Les autres paramètres influençant la qualité et la durée du chauffage sont la forme de la barquette et la quantité de vapeur générée. Le saumon et le poulet ont, dans un four à micro-ondes à puissance 700 watts, des temps de cuisson respectifs d’environ 7 à 8 min.
RÉSULTATS ET DISCUSSION
Évaluation de l’acceptabilité des plats et des emballages par les consommateurs
Une étude d’acceptabilité a été conduite en Norvège auprès de 120 consommateurs réguliers de plats prêts-à-consommer. Après préparation et consommation des plats dans leur propre cuisine, les consommateurs ont fait part de leurs appréciations. Les consommateurs norvégiens ont donné des niveaux d’acceptabilité élevés aux deux plats mis au point dans le cadre de ce programme. Ils ont apprécié l’apparence, le goût, l’odeur et la facilité d’utilisation. Le plat à base de saumon, mais également le plat à base de poulet, a été perçu comme une alternative saine et bonne par rapport à d’autres types de plats préparés.
La déclaration d’un des consommateurs ayant testé le plat au saumon illustre la façon dont la majorité des consommateurs a perçu ce plat :
« Ce plat était absolument délicieux. C ‘est le meilleur plat prêt-à-consommer incluant tous les ingrédients que j’ai goûtés».
L’évaluation d’ensemble montre des différences significatives entre les notes données par les consommateurs aux deux plats. Bien que les deux plats aient des niveaux d’acceptabilité élevés, le plat à base de saumon obtient les scores les plus élevés sur l’intention d’achat, l’impression générale, l’apparence visuelle, la flaveur, l’odeur et la texture. La note d’impression générale attribuée par les consommateurs était particulièrement élevée dans le cas du plat à base de saumon avec un score de 5,7 sur une échelle de 7. Pour le plat à base de poulet, la note était de 5,0.
La texture et la quantité de la majorité des ingrédients inclus dans les plats ont été jugées correctes. La majorité des consommateurs a apprécié la flaveur des ingrédients des deux plats. Quelques consommateurs ont jugé les pois et le chou-fleur trop humides et la viande de poulet trop sèche. La quantité de sauce a été jugée insuffisante dans les deux plats alors que la quantité de nourriture des plats avait tendance à être estimée trop importante.
L’acceptabilité du consommateur pour la barquette mono-compartiment testée dans le cadre de ce programme était élevée avec une note d’appréciation moyenne supérieure à 5. Les consommateurs ont jugé pratique l’introduction de l’emballage dans le four et son retrait du four ; son ouverture a été aussi jugée facile. Quelques consommateurs ont fait des commentaires négatifs sur la praticité comme « Je me suis brûlé les doigts quand j‘ai ouvert le film supérieur » et «Nous avons besoin d’une barquette facile à manipuler pour les consommateurs présentant un handicap fonctionnel». Ces commentaires indiquent que des progrès doivent encore être recherchés sur l’emballage.En complément, huit photos illustrant différents conditionnements du plat à base de saumon ont été présentées aux consommateurs. Les différences portaient sur la couleur de l’emballage (noir, blanc, transparent), le nombre de compartiments (un ou trois) et l’emplacement de la sauce (dans la barquette ou dans une pochette séparée) comme l’illustre la figure 4. La barquette transparente à un seul compartiment avec la sauce à l’intérieur a reçu le niveau d’acceptabilité le plus élevé. Cependant, les consommateurs ont exprimé des préférences individuelles variables sur ces différents types de conditionnement.
Principales caractéristiques des plats obtenues dans le cadre de ce programme
Après plusieurs essais de production des plats à grande échelle, nous pouvons conclure que :
- la durée de vie microbiologique du plat intégrant du poulet mariné au jus d’airelles est de 12 jours à 4 °C ;
- la durée de vie du plat à base de poulet non mariné est seulement de 7 jours ;
- la flore totale recensée sur le poulet a été réduite de 1 log juste après la marinade dans le jus d’airelle et de 2 à 3 log à l’issue du stockage sous atmosphère protectrice ;
- le plat préparé avec des filets de saumon a également une durée de vie de 12 jours ;
- la couleur de la viande de poulet marinée est un peu plus rouge et plus stable au cours de la conservation que dans le cas de la viande non marinée ;
- l’exsudation de la viande marinée est plus grande probablement à cause de la dénaturation des protéines en surface.
Les deux plats, en particulier le plat à base de saumon, ont reçu des scores d’appréciation élevés. L’évaluation par les consommateurs a révélé des suggestions d’amélioration des plats et des emballages.
La modification substantielle de la durée de vie microbiologique obtenue dans le cadre de ce projet pour les deux plats par rapport aux situations actuelles sur le marché renforce l’intérêt de fabriquer et vendre des plats prêts-à-cuire. Avec une durée de vie approchant les 12 jours, un champ de distribution plus large peut être couvert et les pertes en magasins peuvent être réduites. Des améliorations futures de l’emballage, notamment l’introduction de compartiments séparés pour chaque ingrédient, pourraient permettre d’augmenter encore la qualité et la durée de vie des produits. Bien que ces plats prêts-à-cuire soient plus chers, nous pensons que l’apparence, le goût et la valeur nutritionnelle de ces plats les rendront attractifs pour de nombreux consommateurs. Nous percevons également les marchés de la restauration et des fast-foods comme des opportunités intéressantes pour ces plats prêts-à-cuire.
Remerciements
Les auteurs sont reconnaissants vis-à-vis de l’Union européenne qui a apporté son soutien financier au projet Double Fresh (STRFP FR6 PL 023182). Les fabricants de repas prêt-à-consommer et les partenaires du projet Fjordland et Nortura (situés tous les deux à Olso, Norvège) ont contribué au développement des plats.
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